Estime de soi et réussite scolaire

L’estime de soi scolaire : une alliée sûre et nécessaire pour la réussite des élèves.

Les recherches en sciences de l’éducation ont permis de mieux comprendre le rôle de l’estime de soi dans l’apprentissage.

 

L’estime de soi est une notion complexe, qui repose sur quatre composantes : la valeur que la personne s’attribue, sa connaissance de ses forces et faiblesses, son sentiment d’appartenance (faire partie d’un groupe d’amis, de collègues, de chercheurs) et son sentiment de compétence. Par ailleurs l’estime de soi résulte d’une évaluation subjective. Cette complexité permet de comprendre pourquoi une personne peut posséder une bonne estime de soi dans certains domaines et une très basse dans d’autres domaines, et pourquoi cette estime de soi n’est pas toujours directement reliée à des faits objectifs.

 

Notre intérêt portant sur la réussite scolaire nous allons ici nous intéresser à la composante de l’estime de soi qui lui est directement associée : le sentiment de compétence ou croyance en ses capacités.

 

Ce sentiment de compétence pourrait se définir comme la confiance que l’élève a en ses capacités d’apprentissage. Or la confiance en nos capacités joue un rôle déterminant dans notre engagement et dans nos performances. 

 

Car apprendre est difficile, et le progrès n’est jamais « linéaire », en escalier. 

 

Nos erreurs par exemple vont nous ralentir à un moment charnière de l’apprentissage, mais une fois cette étape passée, si l’élève a pu être rassuré, accompagné, s’il a pu comprendre ses erreurs, elles lui permettront d’avancer. Apprendre nous place souvent en position de déstabilisation cognitive et affective. Prenons quelques exemples. Un enfant a compris en maternelle-début de CP que 28 c’est plus que 3. Au moment d’aborder les dizaines, même s’il comprend les explications de la maîtresse, il va avoir tendance à répondre que 28 unités c’est plus que 3 dizaines. Et quelques années plus tard, quand en fin de primaire il abordera les nombres décimaux, il se trompera à nouveau et aura tendance à dire que 1,28 c’est plus que 1,3. En français, un élève qui commence à apprendre qu’il faut mettre un « s » à l’adjectif en présence d’un pluriel, et accorder le verbe avec son sujet pourra, au début de son apprentissage, écrire « je les manges » ou « je les mangent ». Un enfant qui aborde l’imparfait, et qui tout fier s’exclame « ils sontaient heureux » est un enfant qui est en train d’apprendre l’imparfait, de le comprendre. Son erreur fait intégralement partie de son apprentissage… et de ses progrès. De même, l’élève qui écrit « je vous le direz » n’a pas tout  faux ! Dans toutes ces erreurs, on voit bien que quelque chose a été compris, qui doit être dépassé pour aborder le nouvel apprentissage. 

 

Le fonctionnement de notre mémoire va par ailleurs nous tendre certains pièges. Beaucoup d’élèves pensent qu’avoir compris suffit à mémoriser une notion, ou qu’en relisant plusieurs fois un cours jusqu’à le savoir presque par coeur on sera capable de réussir l’évaluation. C’est parfois vrai, mais la plupart du temps, la réactivation et la mise en application à plusieurs moments espacés sont nécessaires. Ce que l’on sait un jour, on ne le sait plus quelques jours plus tard si on n’a pas réactivé, révisé, appliqué.

 

Erreur, oublis, répétitions, mises en pratiques : il n’y a pas d’apprentissage possible sans motivation, qui nous permet de persévérer face à la difficulté, au lieu de se laisser décourager par elle. Or il n’y a pas de motivation possible, donc de persévérance, sans confiance en ses capacités de réussite. Vous passeriez, vous, des heures et des jours et des semaines à un apprentissage, en étant persuadé que vous n’y arriverez jamais, que c’est au-delà de vos compétences, limites, possibilités ? Vous le ferez volontiers par contre si vous vivez cela comme un challenge, un défi, difficile certes, mais à votre portée. Et si les adultes qui vous entourent vous encouragent quand vous commettez des erreurs au lieu de vous juger ou sanctionner.

 

Voilà comment et pourquoi la confiance en ses capacités influence la motivation et donc les résultats de l’élève.

 

Les élèves qui ont confiance en leurs capacités se fixent des objectifs de résultats et de profondeur d’apprentissage plus élevés, se laissent moins distraire, passent plus de temps à résoudre un problème difficile, dominent mieux leur stress et recherchent des activités qui présentent pour eux un défi, même s’ils risquent d’échouer, plutôt que de se contenter de tâches faciles dans lesquelles ils excellent déjà. 

 

Croire en soi est donc fondamental. Quels sont les facteurs qui vont faciliter cette confiance en ses compétences ? Les résultats antérieurs, d’abord. Cela semble évident. Les messages de l’entourage, ensuite. Il est important de ne pas comparer l’élève à d’autres, quand il n’a pas bien réussi, mais plutôt de voir avec lui où et en quoi il a progressé, même si ses résultats sont encore insuffisants. Nos états physiologiques et émotionnels sont enfin déterminants. Epuisé, découragé, triste, en colère, apeuré à l’idée d’être puni ou ridiculisé : personne n’apprend dans ses conditions. Ces composantes réunies vont déterminer le niveau de confiance en soi de l’élève. La résultante étant une « croyance », une évaluation subjective. Avoir confiance ou non en ses capacités, c’est « croire » ou non qu’on peut y arriver. 

 

Les recherches montrent que la réussite d’un élève ne dépend pas seulement de ses capacités objectives, et qu’il en est de même de sa confiance en soi. En sport comme à l’école ou au travail, ceux qui croient le plus en eux ne sont pas toujours effectivement les meilleurs… On peut même avoir des compétences supérieures à la moyenne et avoir peu confiance en soi. On sait, en observant les résultats des élèves à haut potentiel, quelles conséquences négatives cette distorsion peut avoir. 

 

Au-delà des réussites et des échecs d’un élève, c’est surtout l’interprétation qu’il va tirer de l’un et de l’autre qui va être déterminante. Le regard et la parole de l’adulte sont déterminants. Encourager, valoriser, relativiser. Essayer de voir avec l’élève dans quel piège il est tombé, plutôt que de lui redonner à refaire des exercices accompagnés de la nième même explication, et présenter ce piège comme une occasion de progresser en ne s’y laissant plus prendre (une fiche « attrape-piège » qui dit ce qu’il ne faut pas faire est bien plus efficace que les mêmes explications sur comment il faut faire). Donner de petits objectifs précis et à brève échéances. Apporter des commentaires précis sur les résultats, en mettant en valeur les points forts et les points d’amélioration, plutôt que de donner juste une note, même excellente… Et montrer et reconnaître les progrès accomplis. Voilà qui encouragera les élèves à croire en eux. 

 

En conclusion, n’oublions pas l’effet Pygmalion. Si un élève compétent à en face de lui toute l’année un enseignant qui ne le reconnaît pas comme tel, cela s’en ressentira sur ses résultats. A l’inverse, les enseignants bienveillants, qui savent encourager, valoriser, qui croient que l’intelligence est plastique et évolutive, sont aussi les enseignants qui font réussir la quasi totalité de leurs élèves, et progresser les plus en difficulté. La perception de compétence des parents, de la famille, est également importante. Parents, croyez en vos enfants ! Et montrez-leur, quoi qu’il arrive, que vous les aimez et qu’en de nombreux points, vous êtes fiers d’eux.

 

 

Pour en savoir plus, je vous recommande cet article de Benoît Galand :  « Réussite scolaire et estime de soi », du magazine Sciences humaines, N° Spécial N° 5 http://www.scienceshumaines.com/reussite-scolaire-et-estime-de-soi_fr_14911.html

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